Début des primaires : une Amérique en colère
Ca y est, les Primaires vont commencer. Comme prévu, il y a des changements dans les tendances. Le sénateur socialiste Bernie Sanders gagnerait le New Hampshire face à Hillary Clinton et il est parfois aussi donné en tête dans l’Iowa, même si Mme Clinton continue de dominer largement au niveau national.
(PHOTO : Donald Trump est le seul à attirer des foules incroyables à ses réunions publiques, même si Bernie Sanders (Dém) n’est parfois pas en reste. (crédit photo : https://www.facebook.com/DonaldTrump )
Mais il y a 8 ans, 2 semaines avant les Primaires, Hillary Clinton était donnée gagnante face au jeune inconnu Obama. C’est cette fois un « ancien » qui la talonne. Bernie Sanders ne semble pas en mesure de l’emporter sur la totalité des Etats, mais néanmoins il pourrait mettre à mal la légitimité de Mme Clinton. Si elle devait subir une « humiliation » sur les premiers Etats, elle pourrait en tirer des conséquences imprévues.
Côté Républicain, chacun se demande quel est le candidat « normal » qui va, au final, faire tomber Trump. Mais « The Donald » est toujours loin devant les autres. L’espoir des dirigeants du parti semble se porter de plus en plus sur Marco Rubio. Mais le jeune sénateur de Floride s’est englué dans des joutes électorales peu porteuses, et il patine en conséquence à la troisième position des sondages, derrière Ted Cruz qui réalise une campagne virile. Pour le moment Trump gagnerait contre tout le monde au niveau national, mais rien n’est moins sûr dans les premiers Etats appelés à voter.
LES HOMMES EN COLERE FONT LA COURSE EN TETE
Les médias et commentateurs ont beau tourner le « problème Trump » dans tous les sens… son irruption dans la vie politique américaine demeure un grand mystère et soulève toujours chez eux plus de questions que de réponses. Les dés ne sont pas jetés, certes, mais 9 mois après son entrée en campagne, il n’est plus possible de dire que Donald Trump est une anomalie passagère qui va s’évaporer quand les « choses sérieuses » vont commencer. Car elles ont déjà commencé. Quoi qu’il en soit du futur, Trump aura marqué les esprits en s’imposant « seul contre tous » : contre les convenances, contre les médias qui montent en épingle le moindre aspect polémique de ses interventions, et contre les barons de son propre Parti Républicain qui sont unanimes à le détester.
Trump a réussi à instaurer un lien unique et direct entre les Américains et lui-même. Il a le record absolu d’amis sur Facebook et autres réseaux sociaux, il est le seul a pouvoir s’adresser à des salles immenses et survoltées, (quand les autres candidats peinent à remplir des « dinners »), et ajoutons que si on ne trouve pas de stars nationales à soutenir Trump dans ses réunions publiques, il y a toutefois beaucoup d’élus locaux qui se pressent pour aller l’encourager. Il faut admettre que c’est un tour de force : dans la société américaine hyper-médiatisée, Trump est le premier candidat à faire campagne en faisant totalement abstraction des médias et de leurs convenances, alors que les autres candidats en sont obsédés, réglant le moindre détail en fonction de ce que pourraient en dire les commentateurs, avec pour conséquence des discours souvent sans saveur.
Alors, qu’est-ce qui a permis à « The Donald » de devenir le personnage central de cette année politique écoulée ? Pas son expérience politique, ça c’est certain. Largement évoqué, le ras-le-bol d’une grande partie des Américains à l’encontre du politiquement correct n’est plus suffisant non plus pour comprendre le phénomène. Il faut se rendre à l’évidence : l’Amérique est révoltée. Trump n’est pas le seul « homme en colère » à être populaire en ce moment : Bernie Sanders pour les Démocrates ou Ted Cruz et Ben Carson chez les Républicains, ne sont pas en reste.
CONVERGENCES DE COLERES
Alors, chacun peut voir COMMENT Donald Trump se met en colère et sur quels thèmes. Mais personne ne sait trop POURQUOI il est en colère. Qu’importe : il y a convergence entre sa colère, et celle de nombreux électeurs. Le fait qu’il soit en colère semble leur suffire.
Les colères des citoyens Américains sont toutefois plus intelligibles que celles de Trump. Tout d’abord, la middle-class ne profite pas assez de la reprise économique, les salaires n’évoluent pas assez vite, et certains frais s’envolent, liés à la scolarité par exemple. Un autre aspect incontournable est d’ordre idéologique. Le dernier président Démocrate était Bill Clinton, et il n’avait pas suscité tant de désaccords que ça (peut-être, justement, parce que l’économie se portait bien). Les Etats-Unis connaissent en revanche depuis l’élection de Barack Obama une polarisation entre la gauche et la droite comme rarement elle en a connu auparavant. Les mouvement de type Tea Party pouvaient paraître des épiphénomènes il y a 7 ans, mais aujourd’hui force est de constater que cette colère est profonde. La colère de la minorité noire, vis-à-vis d’une ségrégation économique qui se renforce et s’éternise, est pour sa part bien éloignée des préoccupations du Tea Party, mais elle rajoute encore aux crispations.
Enfin, si les Etats-Unis forment un pays habitué aux évolutions culturelles, néanmoins il semble que les changements de ces dernières décennies soient trop radicaux pour beaucoup. La domination des Wasps (américains blancs protestants) donnait une constante culturelle au pays depuis sa fondation. Or depuis une décennie, les Wasps ne dominent plus ni la culture, ni la religion, ni l’économie, ni la politique. En conséquence, certains citoyens se sentent de plus en plus éloignés de cette « nouvelle Amérique », et de ses représentants politiques. D’autant qu’une autre division, géographique celle-là, est également frustrante pour beaucoup et vient s’accumuler : plus de 80% des comtés américains votent pour les Républicains. Mais les grandes villes côtières font souvent basculer les élections en faveur des Démocrates. Au bout d’un moment, la frustration s’installe pour les perdants. Cela ne leur donne par pour autant de légitimité, mais cela permet de comprendre un peu les colères.
Le débat Républicain du 10 mars diffusé sur CNN se tiendra en direct de l’Université de Miami (UM).
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