Electeurs de Donald Trump : mais qui sont-ils ?
Une majorité d’Américains a placé Donald Trump à la présidence des Etats-Unis, mais le vote a été très différent en fonction des races, sexes, de l’éducation et de la géographie.
Le retour du « grand mâle blanc pas éduqué ». C’est ainsi que ce matin de nombreux médias occidentaux (surtout français) ont qualifié la victoire de Donald Trump, dans une multitude d’articles frisant parfois le racisme et le dédain de classe sociale, à l’encontre de la plus grande moitié des américains, celle qui a porté Donald Trump au pouvoir. C’est certain, sur ce coup-là, les Etats-Unis ne se sont pas fait que des amis. Mais qui en réalité a voté pour Donald Trump ? Un sondage sorti des urnes, réalisé par Edison Research, donne des éléments de réponse.
Effectivement, 53% des hommes l’ont choisi, et seulement 42% des femmes. Au niveau des « races » ce sont 58% des « blancs non-hispaniques » (selon la terminologie locale) qui l’ont choisi (ce qui signifie aussi que 42% des « blancs » ont voté pour un autre candidat). Le vote des Afro-américains est beaucoup moins équilibré, puisque 88% d’entre eux ont voté pour Hillary Clinton, et seulement 8% pour Donald Trump. S’il est un « vote racial », il se trouve donc bien ici. Les « Hispaniques » ont eu un comportement électoral plus équilibré, en votant à 29% pour Donald Trump. Il réalise ainsi une meilleure performance que son prédécesseur républicain Mitt Romney qui avait recueilli deux points de moins. Le score modeste, mais réel, de M. Trump chez les Latinos est donc assez révélateur d’un décalage entre les polémiques concernant son hostilité à l’immigration clandestine, la mobilisation de leaders latino-américains contre lui (y compris de nombreux Républicains, comme le maire de Miami) et la volonté des électeurs. Les Latinos des Etats-Unis sont très souvent des petits businessmen ou commerçants à succès, ayant une grande soif de poursuivre leur « american dream ».
Au niveau des tranches d’âge, Donald Trump n’est majoritaire qu’avec les plus de 45 ans. Au niveau géographie maintenant, le divorce entre les deux Amériques est complet. Celle des côtes (nord-est et nord-ouest) a de nouveau voté Démocrate, alors que tout le reste du pays était majoritairement favorable à Trump.
Au niveau géographique, la carte de l’élection « par comtés » est toujours la plus impressionnante pour montrer la fracture. plus de 80% de ces comtés ont apparemment voté pour Donald Trump, et il est ainsi possible de traverser tout le pays sans passer par des comtés ayant voté Clinton, aussi bien du nord vers le sud que d’est en ouest. Seules les grandes villes et les côtes de Californie et du Nord-Est sont en décalage avec cette réalité.
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D’autres sondages sortis des urnes confirment aussi que les deux candidats en lice n’étaient pas vraiment populaires (les électeurs auraient préféré avoir d’autres choix). Mais c’est ainsi beaucoup plus que « l’Amérique rurale » qui a voté Trump : tout un pays qui conteste la concentration de l’économie dans ses métropoles, et l’oubli d’une middle-class américaine qui a du mal à tirer les deux bouts sur la totalité du territoire.
Enfin, alors que depuis la qualification de Trump aux Primaires beaucoup pensaient qu’un grand nombre d’électeurs républicains ne voteraient pas pour lui, la réponse est également tombée. Ils ont été 7% d’électeurs républicains à voter pour Hillary Clinton. Mais, dans le même temps 9% d’électeurs se considérant comme Démocrates… ont pour leur part voté pour Donald Trump.
EDITORIAL : LE REVEIL DE L’AMERIQUE WASP*
Ces indications aident à comprendre les motivations des électeurs. Vote ethnique et/ou raciste ? Non ! Tous les observateurs s’étant déplacés dans les réunions publiques de Donald Trump ont d’ailleurs pu voir que ce n’était absolument pas le cas. Des millions d’Américains sympathiques de la « working class » s’y donnaient rendez-vous, comme dans un bal champêtre des années 1950. Cette mobilisation pour Trump est de manière beaucoup plus évidente un retour (électoral) d’une amérique » de culture WASP », culturellement plus homogène, pas spécialement intéressée par un retour ver un passé où les « blancs » dominaient, mais plutôt par un passé où une culture était partagée. La défiance envers le multiculturalisme est ainsi un point commun de part et d’autre de l’Atlantique, vu les forts mouvements contestataires qui se font jour en Europe depuis quelques années.
Donald Trump a su sentir ce problème avant les autres politiciens américains, en évoquant l’hispanisation du pays de manière claire et brutale. En effet, dès le début de sa campagne étaient présentes des déclarations sur le « mur-frontière avec le Mexique » ou encore des « si vous voulez parler à Jeb Bush appuyez sur la touche 2« (afin de souligner les affinités latinos de son concurrent). Si les propos furent d’une lourdeur affligeante, d’un point de vue stratégique elles illustrent mal la finesse de l’analyse politique. Trump a ainsi fait un pari gagnant avec des idées politiques qui ne sont probablement pas les siennes. En effet, Donald Trump a 70 ans, et jusqu’à l’âge de 68,5 ans… il était plutôt connu pour être un centriste dont personne ne savait trop s’il était Démocrate ou Républicain. La dimension culturelle est cependant loin d’être la seule à expliquer « le vote Trump ». Les aspects économiques sont certainement tout aussi déterminants (voir article ci-dessous).
Gwendal GAUTHIER
* WASP : White Anglo-Saxon Protestant
Lire aussi :
– Notre analyse de la victoire de Donald Trump
Merci pour la correction. Nous sommes un média Américain, et nous sommes tous partis dormir très tard dans la nuit. Donald Trump était en tête du vote populaire également à 2 heure du matin ici, nous n’avons pris connaissance de ce résultat détaillé qu’à notre réveil ! (Nuit bien méritée après beaucoup d’émotions ici à Miami !)
Je suis Francaise, avec une education impeccable sur trois continents, titulaire de diplomes de Hautes Etudes, vie aisee, vivant en Californie. J’ai beaucoup aime votre image de « Bal Champetre » qui me rappelle ma jeunesse en campagne dans les annees 50, ou j’ai gagne in concours de valse musette!!! Trump a ete mon choix des le jour ou il annonce sa candidature, et j’ai ete democrate pendant des annees, devenue centriste, vue la tournure socialiste du parti democrate il y a deja bien des ans…. Je suis ravie.
Correction: comme en 2000 une toute petite majorité des votants a choisi Mme Clinton, mais le système des grands électeurs est défavorable à celle-ci car ses électeurs sont concentrés dans les centres de population côtiers, sous-représentés dans le collège électoral par rapport aux ruraux.