Le consulat de France à Miami fête ses 30 ans !
Le consulat général de France à Miami fête cette année ses 30 ans d’existence ! Il y aura un certain nombre d’événements associés à cet anniversaire et un logo spécial pour l’occasion ! Le moment de revenir sur l’histoire et les missions du consulat avec Philippe Létrilliart, consul général.
(photo en haut : une partie de l’équipe du consulat général)
LE COURRIER DE FLORIDE : Quelles ont été les principales étapes de la structuration du consulat ?
PHILIPPE LETRILLIART : Le consulat général de France à Miami a été inauguré le 27 janvier 1986. Thierry Reynard a été le premier représentant officiel de la France en Floride. Sa mission principale était le développement de nos échanges commerciaux puisque le consulat était alors également un poste d’expansion économique. Nous avons perdu le poste économique en 2005 lorsqu’un regroupement a été effectué à Atlanta mais nous avons conservé notre mission en faveur du développement des échanges commerciaux bilatéraux et de l’investissement. C’est d’ailleurs l’une de mes principales activités.
Mais revenons à 1986. A l’époque, Miami est encore une petite structure et nous disposons d’un consulat général à Porto Rico, qui suit les affaires caraïbes. Ces affaires vont ensuite être gérées depuis Miami avec la création d’un bureau du service des douanes et l’arrivée d’un officier de liaison pour la coopération de police, en 1991. La fermeture du consulat de Porto Rico, en 1999, conduira Miami à suivre directement cet Etat ainsi que les îles Vierge américaines, ce à quoi s’ajoutent les autres îles de la circonscription consulaire : les Bahamas, les îles Caïmans et les îles Turques et Caïques. En outre, depuis 2014, nous accueillons en nos murs un agent du conseil régional de la Guadeloupe chargé de développer les liens commerciaux et culturels entre ce territoire et la Floride.
Le consulat général actuel est le produit de ces différentes étapes. Il est aussi le résultat de l’apport de toutes les personnes qui y ont travaillé. Je dois rappeler le rôle de mes prédécesseurs immédiats, Gaël de Maisonneuve, Philippe Vinogradoff et Christophe Bouchard mais je n’oublie pas mes prédécesseurs plus anciens, notamment Denis Pietton. Notre consulat est aujourd’hui constitué d’une équipe de 24 agents, toutes administrations confondues, et d’un réseau de 6 consuls honoraires. Outre notre relation avec les différents ministères à Paris, nous travaillons quotidiennement avec notre ambassade à Washington et les 9 autres consulats généraux du réseau américain.
LE CDF : Pensez-vous que la vision que les autorités de Floride (politiques, économiques, culturelles etc…) ont de la France a changé grâce au renforcement de la présence française ?
P.L : Je ne sais pas si leur vision a changé. Ce que j’espère, c’est que notre action a contribué à renforcer une image déjà positive ou à corriger des idées reçues. Les autorités de Floride connaissent bien les liens historiques qui unissent la France et les Etats-Unis. Cette mémoire historique est nourrie par nos commémorations : par exemple, celle de la première guerre mondiale dans les trois ans à venir. Elle s’appuie aussi sur de grands témoins : je pense aux anciens combattants de la seconde guerre mondiale auxquels nous remettons la légion d’honneur. Et vous devez savoir que le consulat est le poste le plus actif au monde en cette matière, avec plus de 1500 vétérans décorés depuis une dizaine d’années ! J’ajoute que nous avons la chance de posséder en Floride une histoire unique puisque les premiers Français sont arrivés ici en 1562. L’épisode de la Floride française est un lien fort, que les autorités de Jacksonville et du comté de Duval ne manquent jamais de célébrer. Mais, au-delà de cette histoire commune, ce sont des valeurs communes qui nous unissent, comme nous l’avons vu à la suite des terribles attentats qui ont frappé notre pays l’an dernier. La solidarité de nos amis américains s’est trouvée renforcée par une communauté de principes : respect de l’Etat de droit et des libertés publiques, défense de la démocratie et de la presse, liberté de religion.
Il existe donc, me semble-t-il, une réelle proximité. Cela étant, cette relation doit être confortée et nous devons améliorer encore la vision que les autorités de Floride ont de la France. Renforcer notre image est, en effet, un enjeu essentiel pour notre influence mais aussi, plus concrètement, pour nos exportations. Le consulat y travaille sur le plan politique, en organisant visites et délégations, ainsi que sur le plan économique et dans le domaine culturel en promouvant l’excellence française. En concertation avec les opérateurs économiques français, comme Business France, nous participons par exemple aux salons professionnels de Floride. Au quotidien, j’ai de nombreux contacts avec les entreprises françaises et mes partenaires essentiels pour la promotion de notre pays sont la Chambre de commerce franco-américaine et la section Floride-Caraïbes des conseillers du commerce extérieur. Depuis 8 ans, la FACC organise les French Weeks, qui sont un vecteur extraordinaire pour l’image de notre pays. Le fait que le maire de Miami-Dade, M. Gimenez, invité d’honneur de la dernière édition, ait souhaité davantage d’investissements français en Floride, en citant comme modèle le tunnel du port de Miami construit par Bouygues, répond à votre question. De même, le fait que les CCEF aient à nouveau organisé leur symposium mondial à Miami l’an dernier a fortement contribué à installer les entreprises françaises dans le paysage floridien.
Reste que le renforcement de l’image de la France est l’affaire de tous. Chacun de nos compatriotes y contribue dans son domaine : je pense d’abord aux restaurateurs, aux artistes, aux enseignants mais aussi à tous ceux, de la mode aux hautes technologies, qui mettent en valeur nos savoir-faire. Et, bien entendu, toutes les associations françaises ou franco-américaines jouent un rôle essentiel dans la promotion de notre pays et de notre langue. Je ne peux pas toutes les citer mais, parmi nos partenaires proches, je dois mentionner Miami Accueil qui existe depuis 20 ans, la FIPA, qui atteint également ses 30 ans, la Fondation franco-floridienne pour les Arts, qui a fêté ses 10 ans, et la French American Society of Miami qui vient de naître.
LE CDF : La communauté française s’est agrandie, tout comme le nombre de missions qui vous sont confiées ; le budget alloué au consulat par le gouvernement français a-t-il progressé de la même manière ?
P.L : La communauté française s’est indéniablement agrandie au cours des 30 dernières années. Elle a, en cela, suivi le développement de Miami et de la Floride dans son ensemble. C’est bien le dynamisme économique floridien qui conduit nos compatriotes à venir s’installer dans cette partie des Etats-Unis. C’est peut-être aussi le climat… En revanche, je ne crois guère à l’idée d’une vie « plus facile » en Floride : nous savons tous que pour réussir ici, dans un environnement extrêmement concurrentiel, il faut travailler très dur et bien connaître les pratiques commerciales et la législation américaines.
Pour revenir à votre question, nous avons plusieurs indicateurs d’une augmentation du nombre de Français en Floride : les contacts avec les organisations économiques, les demandes d’inscriptions dans les écoles. Cependant, le nombre des Français inscrits au registre consulaire n’augmente que très peu depuis une dizaine d’années, avec environ 12000 personnes recensées alors que le nombre de nos compatriotes est sans doute deux à trois fois plus élevé. J’encourage donc tous les Français installés dans la circonscription à s’inscrire au consulat. Cela facilitera leurs démarches. Cela nous permettra de les prendre en compte dans notre plan de sécurité en cas de crise grave, notamment d’ordre climatique. Et cela leur permettra de voter dans la circonscription lors des élections présidentielles et législatives, ainsi que pour désigner leurs conseillers consulaires.
Dans le contexte de croissance que je viens d’évoquer, de nouvelles missions ont été confiées au consulat mais son cœur de métier n’a pas changé. Nous sommes d’abord une administration au service des Français. La chancellerie consulaire, dirigée par Karine Aumont, accompagne nos compatriotes dans leurs démarches et leur fournit leurs documents d’identité et de voyage. Nous délivrons environ 2400 passeports chaque année. Outre les questions de sécurité que nous suivons avec nos 38 chefs d’îlots et chefs d’îlots adjoints dans toute la circonscription, nous apportons une aide aux Français en difficulté et suivons la situation des personnes incarcérées. Le service des visas délivre environ 3000 visas par an aux étrangers qui souhaitent visiter notre pays ou y travailler. Cette activité s’appuie sur le réseau de nos consuls honoraires, mis en place par étapes dans les trente dernières années. Membres à part entière de notre équipe, nos 6 consuls honoraires sont le relai local du consulat à Orlando avec Brigitte Dagot, à Tampa avec Jean-Charles Faust, à Jacksonville avec François Kloc, à Nassau avec Dominique Lefevre, à Grand Cayman avec Sébastien Guilbard et à San Juan avec Antoine de Marsily.
Le suivi des affaires économiques est une autre mission essentielle du consulat, je n’y reviens pas. Je dois en revanche souligner le rôle important du service culturel dans la promotion de la culture française, avec un accent mis sur les arts visuels et le design, la francophonie, le suivi des questions scolaires et de la coopération universitaire, la promotion du français : des secteurs essentiels au rayonnement de notre pays et à notre influence. Nous avons également, comme vous le savez, un service de presse très actif et j’invite chacun à nous suivre sur Twitter et Facebook et à consulter notre site et notre newsletter, l’E-toile. Pour toutes ces missions, nous disposons des budgets nécessaires. Je ne vous cache pas cependant que nous participons, comme toute l’administration, à l’effort en cours pour réduire le déficit budgétaire.
LE CDF : Parfois le rôle du consul de France est perçu par les uns ou les autres de différentes manières, tout à la fois diplomate, préfet, « maire des Français de Miami », en charge des affaires culturelles, économiques, scolaires etc… La communauté ne se repose-t-elle pas beaucoup sur les épaules d’un seul homme ?
P.L : Je ne crois pas beaucoup aux logiques pyramidales. Et je ne crois pas non plus que l’on puisse plaquer le modèle préfectoral sur les services extérieurs du Quai d’Orsay. Bien entendu, le consulat remplit des fonctions qui s’assimilent à celles de certaines administrations en France. Bien entendu, j’assume pleinement mon rôle de représentation de notre pays auprès des autorités floridiennes. Bien entendu, je suis attentif aux questions qui touchent directement la communauté française : questions de sécurité, questions scolaires notamment.
Cependant, je crois qu’on est plus efficace en utilisant les compétences de chacun. C’est pourquoi je m’appuie sur des logiques transversales et sur les pôles et les réseaux qui existent dans notre communauté. A cet égard, je dois souligner le rôle essentiel des élus avec lesquels le consulat travaille étroitement. Notre député, Frédéric Lefebvre, nos sénateurs des Français de l’étranger, nos conseillers consulaires, Nicole Hirsh, Xavier Capdevielle, Jacques Brion et Franck Bondrille, sont très actifs et très présents sur le terrain. Ils portent des initiatives fortes dans de nombreux secteurs : éducation, promotion du français, protection sociale notamment. Je veux en particulier rendre hommage au travail effectué par Nicole Hirsh, depuis de nombreuses années, au service de nos compatriotes. Je dois également souligner le rôle des associations. J’en ai cité plusieurs. Je souhaite ajouter le Cercle des amis francophones de Naples, Bonjour Weston, les Amis de la culture française, les Amis de la France à Daytona, ainsi que les 6 Alliances françaises de la circonscription. Concernant les échanges culturels et la promotion de la langue française, je n’oublie pas le rôle de nos amis francophones : Québecois, Haïtiens, Libanais, Belges, Suisses pour ne citer que les plus représentés en Floride.
LE CDF : Quel est votre rôle principal ?
P.L : Si j’étais musicien, je serais peut-être chef d’orchestre… Plus modestement, j’essaie de promouvoir nos intérêts en utilisant au mieux les capacités des uns et des autres.
LE CDF : La présence française en Floride a-t-elle des retards de structuration par rapport aux autres circonscriptions consulaires, que le gouvernement envisagerait de combler dans les prochaines années ?
P.L : On peut toujours faire mieux et on doit toujours chercher à faire mieux. Maintenant, chaque circonscription consulaire a ses particularités propres, qui demandent des solutions adéquates sans modèle préconçu. Ce que je crois, c’est que nous devons avoir une gestion dynamique des situations et rechercher des solutions durables.
La situation des écoles est un bon exemple pour répondre à votre question. Nous ne pouvons pas nous comparer à d’autres circonscriptions car si notre communauté est importante, elle est relativement plus récente. Mais nous pouvons adopter de bonnes pratiques en associant tous les acteurs. Nous faisons face à une difficulté qui tient à la différence entre une demande de scolarité en français croissante, liée à l’arrivée de nouvelles familles, et une offre limitée non seulement à Miami mais dans toute la Floride. L’ouverture de nouvelles écoles est donc bienvenue, comme cela a été le cas récemment à Boca Raton ou avec l’annexe de l’EFAM à Miami Shores. Et j’encourage les projets en cours, notamment le projet de lycée. Concernant l’offre scolaire dont nous disposons, elle est diversifiée et permet aux parents, dans la mesure du possible, d’adapter leurs choix (écoles à charte et privées homologuées, écoles publiques américaines bilingues, programmes FLAM).
Depuis mon arrivée, je travaille à consolider cette offre et je crois que nous avançons. Mais nous ne pouvons le faire qu’en associant tous les partenaires afin de construire des solutions de long terme. C’est pourquoi je soutiens l’action de la FIPA, qui est essentielle, dans sa recherche de financements. J’appelle d’ailleurs les parents d’élèves à contribuer davantage à la FIPA. Je remercie également les parlementaires qui participent au financement de l’offre scolaire. Parallèlement, le consulat et l’ambassade progressent sur les domaines qui sont de leur compétence, en particulier la reconnaissance par la France de la qualité de l’enseignement dispensé par les établissements scolaires. Le 21 septembre dernier, j’ai signé avec les autorités de Miami-Dade Public Schools un communiqué favorable à l’attribution du Label France Education aux écoles de la filière « International Studies ». ISPA l’a déjà reçu. Nous travaillons actuellement à l’attribution de ce label à d’autres établissements du comté. Ces établissements pourront postuler au fonds fédéral qui doit être mis en place à l’ambassade, dans le cadre du soutien accordé au développement des sections bilingues dans le système scolaire américain. Ce fonds contribuera, en particulier, au financement d’assistants de langue française et à la formation continue d’enseignants.
LE CDF : Si vous aviez le choix entre Miami et ailleurs… souhaiteriez-vous rester en Floride ?
P.L : Si j’avais le choix… je souhaiterais rester dans tous les pays où je suis passé, en Amérique latine comme en Asie et comme aujourd’hui aux Etats-Unis, car j’ai partout rencontré des gens passionnants et des problématiques intéressantes. Mais je crains de ne pas avoir le choix. En tous les cas, je suis très heureux de résider aujourd’hui en Floride et pas seulement parce qu’il y fait beau ! J’y ai beaucoup d’amis et d’interlocuteurs que j’apprécie. J’aime la diversité de la Floride tant du point de vue culturel que des communautés humaines. Et je reste très intéressé par le phénomène économique que représente la métropole de Miami et par les potentialités qui s’offrent à nos entreprises. Mais me voilà revenu aux questions professionnelles…
- LE CDF : Que sera l’année des 30 ans du consulat ?
P.L : Ce sera un anniversaire que nous souhaitons joyeux mais modeste, rappelant notre action mais collectif, associant tous les acteurs français, francophones et francophiles. Nous avons voulu donner une identité à cet anniversaire en utilisant un logo spécifique, créé pour l’occasion par le designer Heber Siqueiros. Comme chacun peut le voir, il s’agit de mettre à nos couleurs –qui sont aussi celles des Etats-Unis- une ville dynamique, ouverte, active. C’est Miami puisque notre consulat y est situé mais ce pourrait être une autre grande ville de Floride. Ce logo sera utilisé tout au long de l’année, dans nos publications, lors de nos événements ou en association avec nos partenaires. Nous publierons également sur nos réseaux sociaux, à intervalle régulier, des chiffres et des faits illustrant ce que nous faisons. Enfin, nous avons rassemblé de nombreuses photos et illustrations que nous vous montrerons au fur et à mesure de l’année. Cela commencera dès la date anniversaire du 27 janvier avec une brève vidéo créée pour l’occasion que j’invite chacun à découvrir sur notre site.