Pourquoi appelle-t-on ‘Jack’ les Américains qui se prénomment ‘John’ ?
Voici la question existentielle la plus importante du moment : Pourquoi aux Etats-Unis surnomment-on ‘Jack’ ceux qui s’appellent John, comme ce fut par exemple le cas avec John Fitzgerald Kennedy, Jack Nicholson, et même Jack Kerouac (qui en réalité s’appelait Jean-Louis (1) !) et bien d’autres ?
La réponse est la suivante, et elle ne surprendra que les jeunes générations qui ont une habitude récente des pays anglophones (2), l’équivalent du ‘Jacobus’ hébreu (qu’on appelle saint ‘Jacques’ dans les pays francophones) n’a jamais été ‘Jack’, mais… James.
Alors, d’où vient le ‘Jack’ des Anglais, Américains ou encore Australiens ? Il est bel et bien le surnom de John, et il vient exactement de ‘Jankin’ qui, au Moyen-Âge, voulait dire ‘petit John’, et qui fut ensuite transformé en ‘Jackin’, puis simplement en ‘Jack’.
Ainsi, autrefois, Jack n’était pas un prénom dans les pays anglophones. Mais depuis la deuxième moitié du XXème siècle, il l’est aussi progressivement devenu. A tel point qu’en 1998 il est le prénom le plus donné aux bébés londoniens. Mais pas du tout durant les 1997 années qui lui ont précédé.
Or, aux Etats-Unis, il n’est pas devenu un prénom si populaire. En 1994, seuls 0,3% des bébés étaient prénommés Jack. Depuis lors, le prénom s’est hissé en 35e position des ‘first names’, mais ça n’en fait pas encore une règle : ‘jack’ y demeure souvent le surnom de ‘John’, même si ce prénom-là a chuté de son piédestal : il est désormais, seulement, le 4ème prénom le plus donné aux Etats-Unis. Et, pour sa part, James (qui est le ‘vrai Jacques’ (si vous nous avez suivi)) : James était ainsi en 2017 le 4e prénom le plus porté aux USA.
Alors, pourquoi Jack n’a-t-il pas été plus tôt un vrai prénom dans l’histoire des pays parlant anglais (1) ? Dès le XVIème siècle, l’expression ‘jack’ sert à désigner une personne positionnée assez bas sur l’échelle sociale, puis une sorte d’homme à tout faire. Du bricoleur, cette expression a ensuite été accolée à un outil portable : le cric (3). Mais un jack c’est également tout un tas de choses pas spécialement… ‘sexy’ : un jeu d’osselets, un bouchon sur la route, un cochonnet de jeu de boules, un valet (serviteur, dans le jeu de carte par exemple), un âne… De même pour les mots composés, il n’y en a guère d’agréables : un hijack c’est un pillage, carjacking un vol de véhicule, un jack straw c’est un épouvantail (‘jack en paille’), jack-in-the-box est le diable mécanique qui sort de sa boite, une citrouille d’Halloween peut être surnommée ‘Jack O’ Lantern’, de l’eau de vie (apple jack) avec laquelle on peut être défoncé (jacked up). Il y a même un oiseau noir dénommé jackdow (le choucas) ! Sans remonter jusqu’à une lettre d’un Londonien s’accusant en 1888 d’être un tueur en série et signée d’un certain ‘Jack l’Eventreur’ : ça fait quand même quelques raisons objectives de ne pas s’appeler ‘Jack’ durant les 20 premiers siècles de notre ère !! Les seuls mots positifs composés grâce à ce nom sont le pavillon des bateaux, qu’on peut ainsi appeler ‘jack’ (comme ‘l’Union Jack’ du Royaume-Uni) et encore le ‘Jackpot’ des bienheureux gagnants !
Particularités :
– Jack a toujours été un ‘vrai’ prénom en Ecosse. Le nom de famille (et plus tard le prénom) ‘Jackson’ y avait été originellement attribué a quelqu’un qui, de toute évidence, était le « fils de Jack ».
– En Irlande, le diminutif de John, c’est ‘Jock’ !
– (1) Le célèbre écrivain américain est né ‘Jean-Louis Lebris de Kérouac’, de parents Québécois d’origine bretonne.
– (2) Nous utilisons l’expression ‘pays parlant anglais’ ou ‘pays anglophones’ là où d’autres emploieraient encore le terme ‘Anglo-Saxons’ : vu le nombre d’Angles et de Saxons qu’on trouve désormais à Londres ou à Miami… il est certainement temps d’arrêter !!
– (3) Plus tard : ‘jackhammer’ viendra désigner un ‘marteau-piqueur’ (autre outil portable), mais aussi le bûcheron à travers l’expression ‘lumberjack’.