Pourquoi et comment les Etats-Unis devraient continuer d’accepter l’immigration
Une majorité d’américains n’étant pas opposés à l’immigration, les dirigeants s’alignent sur l’opinion publique, y compris Trump.
Depuis l’élection de Donald Trump – qui s’est entre autres jouée autour de la question du « mur » à la frontière mexicaine – beaucoup s’inquiètent des nouvelles dispositions restreignant l’immigration vers les Etats-Unis, et pas seulement l’immigration clandestine : la récente annonce de réforme des visas E1 et E2 pour les Français a par exemple provoqué de fortes inquiétudes. Voilà au contraire quelques raisons pour ne pas trop s’en faire.
Tout d’abord, les USA ont toujours été une terre d’immigration, et à chaque fois que quelqu’un s’est élevé contre cet état de fait… ça n’a en rien empêché l’immigration de continuer. Certes, elle continue de manière plus ou moins contrôlée en fonction des époques et des ressortissants qui tentent de passer les frontières. Mais sur le principe, ça continue. D’ailleurs, selon le dernier sondage Gallup, 27% des américains sont favorables à plus d’immigration, ce qui est un record absolu. Et 37% sont favorables à ce que le niveau demeure le même. A l’opposé, seuls 35% des citoyens sont favorables à une baisse de l’immigration. Cette tendance a emmené à deux signaux politiques remarqués.
Chez les Démocrates : lors de sa première campagne présidentielle, Hillary Clinton s’était par exemple déclarée favorable à un renforcement des contrôles des entreprises pour traquer les employeurs qui embauchent les clandestins, à qui elle souhaitait qu’on refuse également des papiers d’identité comme le permis de conduire. Il y a 4 ans, lors de sa seconde tentative, Mme Clinton s’était excusée d’avoir dit cela. Une forte personnalité comme Bernie Sanders n’était pas non plus très favorable à l’immigration clandestine, qu’il voyait surtout comme une sorte de complot capitaliste pour faire baisser les salaires. Lui aussi est moins aujourd’hui moins ferme sur le sujet. Le Parti Démocrate semble dorénavant plutôt favorable à une régularisation des clandestins et traite assez facilement de « fasciste » ceux qui s’y opposent, à commencer par l’actuel locataire de la Maison-Blanche.
Justement, du côté de Donald Trump ça évolue aussi. Malgré la non-construction du « mur », sa politique de fermeté face aux clandestins semble fonctionner : il y a de moins en moins d’arrestations aux frontières, car les candidats à l’immigration illégale semblent avoir compris le message.
Mais Donald Trump lit les mêmes sondages, et s’il est archi-propriétaire des voix des électeurs hostiles à l’immigration… il peut aussi bien constater que ça ne lui donnera pas une majorité. Il pourrait même avoir cette fois besoin d’un peu plus de voix provenant des minorités ethniques afin d’être réélu. Donc il sera peut-être plus prudent sur le sujet.
Le président pourrait aussi, en contrepartie, être plus modéré que par le passé sur la question de l’immigration légale… ceci compensant cela. Son plan évoqué en mai dernier, promettait de recentrer cette immigration légale vers une « immigration au mérite », favorisant moins les regroupements familiaux que l’arrivée de personnes « jeunes et éduquées ». Au quel cas on pourra peut-être dire adieu à la « loterie pour la carte verte », mais il serait au contraire très surprenant que la Maison-Blanche s’en prennent aux investisseurs étrangers, par exemple.
Les grandes lignes de ce plan ont été présentées en septembre aux sénateurs républicains par le conseiller spécial (et gendre présidentiel) Jared Kushner. Il n’a pas eu beaucoup de succès avec les sénateurs, mais il semble toutefois que le contenu se confirme en faveur d’une augmentation de l’immigration légale, ce qui serait ainsi un tournant stratégique de la politique de Donald Trump.
La faisabilité des réformes dépendra certainement des possibilités de trouver un consensus au Congrès sur un point OU sur l’autre, car si la réforme mélange immigration légale et immigration illégale… ce sera beaucoup plus difficile de mettre les Démocrates d’accord avec les Républicains ! Mais pour ce qui est de l’immigration légale, elle n’a en tout cas pas décliné en quatre ans, et il semble ainsi qu’il y ait beaucoup moins de menaces qu’il y a quatre ans.
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