Quel est l’avenir du trumpisme après 2020 ?
Par le passé, les perdants de l’élection présidentielle américaine avaient généralement tendance à ne plus susciter beaucoup d’intérêt et en conséquence à disparaître du champ politique. Mais – première évidence concernant « le futur du trumpisme » – Donald Trump n’a besoin que d’un compte Twitter pour déchaîner les passions en 140 caractères. Ainsi, il ne faut peut-être pas pronostiquer trop vite sa disparition totale du paysage politique. D’autant que les médias semblent « drogués » au phénomène : ça fait 5 ans qu’ils passent leur temps à le détester. Arriveront-ils à se passer de leur meilleur ennemi ?
Comme il l’a dit lui même, avec plus de 71 millions de votes, Trump a été « le président sortant qui a recueilli le plus de voix« . Sa popularité est donc bien réelle. Mais son futur politique dépendra aussi de sa forme – physique et financière – deux qualités qui lui ont permis de devenir président en 2016. Car, « The Donald » n’aura « que » 78 ans en 2024, et il pourrait bien avoir envie d’y retourner : peu de choses sont capables d’arrêter cet homme, chacun en a désormais conscience.
Si on parle d’héritage, bien entendu il faut évoquer la (large) famille Trump. A défaut d’avoir une famille royale, les Américains aiment les dynasties, des Kennedy aux Bush. Si les enfants Trump ne fuient pas les caméras, le seul d’entre eux qui semble vraiment à l’aise en politique est Donald Trump Jr. En 2024 il aura 46 ans, il porte le même nom, et la notabilité est un facteur clé pour gagner les primaires et les élections américaines en général. S’il fallait être politologue pour devenir président des Etats-Unis (tout d’abord ça se saurait !) et Trump Jr ne pourrait alors pas être président. Mais il apprécie la politique, il est à l’aise sur les plateaux télévisés, et il a appris à naviguer dans la tempête avec son père. Il a même quelques avantages par rapport au patriarche : il est moins nonchalant, et il est physiquement beaucoup moins… spécial. Il a aussi un peu plus d’empathie que son père quand il s’exprime (ce qui n’est pas difficile).
Savoir prendre des risques et encaisser les coups, c’est toutefois ce qui a fait la différence entre la famille Trump et les autres Républicains. Car la « ligne sage » (et néo-conservatrice) d’un Mitt Romney ou d’un John McCain ne leur a pas permis de gagner la Présidentielle, loin de là, chacun s’en rappelle. Seul Trump a réussi à rallier tous les électeurs de droite dans un même élan, car les nationalistes américains n’allaient auparavant plus du tout voter pour les Républicains, avant que Trump ne les réveille ainsi en 2016.
Qu’est que le trumpisme ?
Une sorte de nationalisme constitué d’une idéologie assez simple et légère, que certains résument par le mot « populisme ». Il s’agit d’un conservatisme des mœurs allié à un capitalisme un peu plus relocalisé, qui s’oppose au « mondialisme ». Si Trump a réussi à mettre toutes les droites d’accord, c’est précisément autour du concept de « frontière » : la frontière physique (qu’il voulait instaurer avec le Mexique et symbolisée par un « mur »), ou la frontière économique (pour empêcher les délocalisations d’entreprises et d’emplois vers la Chine etc). Mettre ces sujets en avant a immédiatement provoqué un rassemblement autour de lui en 2016, mais aussi un tir de barrage contre le « racisme ». Or, dans le monde occidental, les politiciens sont assez peu nombreux à réussir à braver de telles accusations de racisme. C’est là que la force de Trump a fait la différence : il a su maintenir sa ligne (et une certaine virilité qui a peut-être aussi compté) sous un déluge de missiles et l’hostilité de 99,99% des médias.
L’équation du trumpisme peut aussi être résumée ainsi : « L’Amérique du futur ne fonctionne pas, alors il faut revenir à « celle d’avant », celle où tout le monde avait la « même culture » et parlait la « même langue ».« . A ceux qui pensent que toutes les autres pistes politiques ont été explorées, la nostalgie d’un « monde meilleur » n’est pas la pire des incohérences. Au quel cas, la recette se résume ainsi : « Make America Great Again ». Et en 2024, nul doute que cette chanson sera toujours audible.
L’Amérique aura-t-elle changé en 2024 ?
C’est une question assez essentielle, car aujourd’hui deux Amériques s’affrontent radicalement. Le vote Trump est en partie provoqué par une situation économique et sociale inacceptable pour certaines personnes modestes, mais aussi pour les habitants des zones plus rurales qui s’opposent à ceux des grandes métropoles. Si ces deux lignes de fractures subsistent en 2024, et s’ajoutent à la plus classique division « droite/gauche », alors le trumpisme pourrait avoir de beaux jours devant lui.
Qui pour tenir cette ligne ?
En 2016, Trump avait imposé son nationalisme à peu près seul contre la totalité des membres de son Parti Républicain. Steve Bannon était l’un des seuls à s’être ensuite attribué la paternité du trumpisme, mais c’est franchement très discutable. A priori, le seul inventeur du trumpisme… c’est Trump ! Après sa victoire de 2016, certains républicains hostiles, comme Paul Ryan, avaient quitté la politique. D’autres se sont écartés (Jeb Bush), mais la plupart s’est rangée sous les ordres du patron et de sa nouvelle ligne politique. Toute la question, c’est aujourd’hui de savoir si cet engagement était franc de leur part, ou simplement de façade : s’ils retourneront au galop sur des lignes moins polémiques. Dès le soir de l’élection présidentielle de 2020, on en a vu très rapidement s’écarter du « sulfureux » Trump.
Pourtant, comme expliqué plus haut, il paraît difficile aux Républicains de l’emporter sur une autre ligne. En tout cas, en 2020 c’est comme ça que se passe. Pour 2024 il faudra certainement reconsidérer le paysage politique, mais il y a des chances pour qu’il n’ait pas tant changé que cela. La question fondamentale est donc de savoir si les Républicains préféreront perdre sur un programme plutôt centriste, ou plutôt néo-conservateur, ou alors avoir des possibilités de gagner sur une ligne populiste. Mais, encore une fois, pour faire du césarisme, le plus important c’est de trouver… un César.
PS : Voici la définition du « césarisme » sur Wikipedia : « Le césarisme est un régime politique inspiré du gouvernement de type monarchique que voulait imposer Jules César à Rome, où le pouvoir est concentré entre les mains d’un homme fort, charismatique, appuyé par le peuple, de préférence chef militaire. Ce type de régime peut comporter une forte dimension démagogique, voire populiste, dans le sens où le chef tirerait officiellement sa légitimité directement du peuple et contre l’élite. »
PUBLICITE :
3 commentaires