La Chambre a voté la destitution de Donald Trump, mais le Sénat aura plus de difficultés
La Chambre des Représentants a voté mardi soir l’impeachment de Donald Trump par 232 voix contre 197, pour avoir « incité à l’insurrection » lors de l’invasion du Capitole par certains de ses partisans le 7 janvier.
Aux Etats-Unis, on appelle impeachment (destitution) le vote d’une majorité de la Chambre en faveur de l’impeachment du président. Le président est alors « impeached », mais pas destitué (c’est là que ça devient compliqué !), en tout cas pas avant que le Sénat ait lui aussi voté pour ou contre. Or si une simple majorité est suffisante à la Chambre pour prononcer l’impeachment (comme ce fut le cas ce mardi et en janvier 2020), au sénat il faudra que les deux tiers des 100 élus se prononcent en faveur de cette destitution, c’est à dire 67 sénateurs. Les Républicains ayant cinquante élus, il faudrait donc que dix-sept d’entre eux se joignent à cinquante démocrates pour que Donald Trump soit destitué. L’enseignement de ce mardi, c’est que les Républicains n’ont pas la même lecture que les Démocrates des événements ayant emmené à cet « impeachment ». En effet, seuls 10 des 207 Représentants républicains à la chambre ont voté pour l’impeachment de Trump, c’est à dire 5%. Bien entendu, les Démocrates vont « travailler » les sénateurs Républicains, mais en tout cas il est possible d’affirmer ce soir que Donald Trump fait à peu près l’unanimité chez les Républicains, en tout cas si on s’en tient à ce vote. Il n’a jamais été la personnalité la plus populaire du parti, loin de là, mais il semble à peu près tenir ses parlementaires. Les Démocrates pensaient qu’un plus grand nombre d’élus républicains saisiraient l’occasion de se débarrasser de Donald Trump, et la déception était perceptible ce mardi soir : les votes montrent qu’il s’agit de l’avis d’un parti contre l’avis de l’autre parti.
Le quotidien New-York Times maintient toutefois qu’une vingtaine de sénateurs pourraient se retourner contre Trump. Mais ça paraît tout de même très incertain. De tels « comptes » étaient déjà apparus l’an dernier, et au final les Républicains étaient bel et bien restés fidèles à Donald Trump.
La prochaine réunion du sénat aura lieu le 19 janvier, mais il lui sera très difficile de voter pour ou contre la destitution avant la fin du mandat de Donald Trump, soit le 20 janvier à midi. La procédure pourra toutefois se dérouler après la prise de pouvoir de Joe Biden, et empêcherait ainsi M. Trump de se représenter à une élection ultérieure, par exemple lors de la prochaine élection présidentielle en 2024. Il paraît à peu près évident, au quel cas, qu’un de ses fils serait candidat à sa place dans quatre ans.
Editorial : La légitimité des présidents américains n’est plus évidente
Les Etats-Unis ont un problème de légitimité de leurs présidents. Ils étaient déjà nombreux en 2008 derrière Trump à contester que Barack Obama fut un « vrai » président, assurant qu’il n’était « pas né aux Etats-Unis » (jusqu’à ce qu’Obama publie son certificat de naissance). Puis ce furent les Démocrates qui contestèrent par différents moyens la régularité de l’élection de Trump en 2016, et essayèrent à plusieurs reprises de le destituer, entre autres avec ces deux procédures d’impeachment. Lors de l’élection présidentielle du 3 novembre dernier, 83% des électeurs Républicains pensaient derrière Trump qu’il y avait eu une fraude au profit de Joe Biden. Ainsi, suite à Obama et Trump, pour un très grand nombre d’Américains, Biden est le nouveau « not my president ».
La conséquence de cet « impeachment » de Trump en 2021 risque surtout d’être l’impeachment de Joe Biden en 2022, et ainsi de suite. Pendant combien de temps ? En tout cas, pour le moment la division de l’Amérique est profonde, violente, et ce n’est vraiment pas un bon signe ni pour elle, ni pour le reste du monde.
Gwendal Gauthier
Directeur du Courrier des Amériques
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