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Miami : Anne Chicheportiche, une vie pour le violon !

Portrait d’un jeune violon solo de Miami, la française Anne Chicheportiche, également fondatrice et organisatrice des soirées Musimelange !

Elle est native de Nice, dans une famille où il n’y avait pas de musiciens. « C’est ma sœur qui prenait des leçons de piano. Un jour sa prof s’est rendue compte que je lui soufflais les notes alors que je n’avais que 3 ou 4 ans. Elle a vu que j’avais l’oreille absolue*, et proposé à ma mère de me donner des leçons gratuitement. Mais j’ai refusé. Alors, en plus, elle m’a proposé de me donner des habits de poupée Barbie. Là j’ai accepté ! Malheureusement elle est décédée quelques temps plus tard, et de toute façon je n’avais pas accroché avec le piano. Avec la musique, oui ! Ma mère m’avait vu pleurer devant des musiques de publicité. Etonnée elle me demande « mais pourquoi tu pleures » ? Et je lui avais répondu : « parce que c’est beau ». A l’âge de 7 ans j’avais essayé de la convaincre de m’acheter une harpe, mais elle se disait que si je ne m’en servais pas, ça allait être encombrant en plus du piano ! Alors, elle a pensé « cordes », et elle m’a acheté un violon. Je l’ai touché… et je n’ai jamais plus arrêté. » Mais pourquoi certains enfants sont-ils plus perméables que d’autres à la musique classique ? « C’est une question d’âge. Si vous leur en faites écouter très jeunes, ils vont aimer. De même pour l’oreille absolue ; certains pensent que c’est acquis à la naissance. Moi je suis persuadé que c’est en écoutant ma sœur jouer. Ca se travaille chez l’enfant.« 

Anne Chicheportiche, violoniste et fondatrice de Musimelange : les concerts de musique de chambre à Miami.

Ce genre de talent et de passion… ça a un coût. Celui d’un sacrifice familial important. A l’âge de 15 ans, Anne Chicheportiche part pour le conservatoire de Boulogne-Billancourt, bien loin de Nice. Elle sera ensuite acceptée en même temps au conservatoire supérieur de Genève et à celui de New-York. Elle choisit les Etats-Unis. Mais juste avant la rentrée, elle est victime d’un accident de voiture et est blessée aux vertèbres. « Les médecins m’ont dit que je ne pourrais plus jamais rejouer de violon. Mais une semaine plus tard je devais accompagner Dionne Warwick à Monte-Carlo. J’y suis allée avec une minerve, je l’ai enlevée au moment d’entrer sur scène pour jouer « I Will Survive » ! J’ai décidé qu’un médecin ne pourrait pas stopper ma carrière, et finalement j’ai fait des aller-retours entre le conservatoire de Genève et les soins à Nice. Au bout de deux ans j’ai récupéré l’essentiel de ma mobilité. » Sûrement un peu trop : elle accepte immédiatement une bourse pour venir étudier à la Lynn University de Boca Raton en Floride. « Je pense que tout arrive pour une bonne raison ; que la vie me donnait ce dont j’avais besoin. Je me suis rendue compte que mes études à Genève m’avaient permis d’avoir cette formation musicale européenne qui est très différente de ce qui se fait aux Etats-Unis, et j’en suis très contente. En Europe tu es obligé d’apprendre des musiques, y compris celles avec lesquelles tu es moins à l’aise. Aux Etats-Unis on te pousse surtout à te parfaire dans la matière où tu es bon. Or cette connaissance des langages musicaux, des différentes richesses sonores, c’est vraiment ce qui fait ma différence aujourd’hui.« 

L’improvisation, Anne connaît assez bien : « A la fin de mon année à Boca, je voulais rentrer en France, mais une amie m’a convaincue de tenter un master à Chicago, il y avait encore des auditions alors qu’on était en mars. J’y suis allée sans même savoir devant qui j’allais passer. La veille j’ai appris que ça allait être Ilya Kaler. Après m’avoir écouté, il est venu me donner un papier et me dire : « venez me voir la semaine prochaine ». Je suis restée trois ans à Chicago, je suis ensuite aller faire mon doctorat à Washington avant de revenir m’installer à Miami.« 

Ici, comme beaucoup de musiciens classiques, Anne Chicheportiche multiplie les activités professionnelles. Elle est prof au Miami Dade College, elle joue dans les grands ensembles locaux (Florida Grand Opera, Palm Beach Symphony, les concerts du Arsht Center), et elle continue à partir parfois en tournée. « Depuis que j’ai eu mon premier enfant, j’ai un peu levé le pied. Soit il peut venir avec moi, soit je ne pars que pour des courtes durées. J’attends qu’il soit plus grand pour reprendre une carrière internationale solo. » Et puis Anne a d’ores et déjà marqué l’histoire musicale de Miami en lançant ses soirées « Musimelanges« .

DE MAHLER A ADELE

Et quelles sont ses morceaux préférés ? « Je n’en ai pas vraiment… comment choisir parmi  300 ans de chefs-d’œuvre ? Quand une œuvre me marque plus qu’une autre, elle est habituellement reliée à une émotion forte ou à un événement important de ma vie. Quand j’en rejoue certaines, les émotions et souvenirs remontent alors à la surface et c’est souvent des moments très beaux et nostalgiques. Comme la découverte des symphonies de Mahler quand j’avais 15 ans lors de mon emménagement seule à Paris. Ou bien l’apprentissage intensif de Prokofiev, Chostakovitch, Brahms et bien sur Beethoven sans oublier Mozart et Haydn avec des pointures comme Pierre Boulez, Bernard Haitink, Ilya Kaler, Myung-whun Chung, Arnold Steinhardt et plein d’autres. Mais, cela dit, pour les mêmes raisons que les symphonies et concerto des grands du classique ont influencé ma vie et mes émotions, je suis aussi très touchée par la musique de Queen, Jamiroquai, Adèle, Billy Joel, Ray Charles, Franck Sinatra, Sam Cook et aussi Harry Connick Jr, Corinne Bailey Rae, Chicago…« 

La vie de musicien classique est certainement aujourd’hui l’une des plus « bohèmes » : ce n’est pas le genre de métier où il est facile de remplir un stade avec des dizaines de milliers de spectateurs. Et quand les Rolling Stones jouent toujours les mêmes musiques depuis 40 ans, vous vous êtes obligé de répéter durant des dizaines d’heures des partitions que vous n’avez jamais vues auparavant, pour finalement gagner des cachets bien moins élevés que votre talent. « Quand vous achetez un billet de concert, il ne représente que 25% du coût du spectacle. Le reste, ce sont les mécènes et sponsors qui financent les spectacles. Heureusement, sans eux nous ne pourrions pas nous déplacer à l’extérieur de notre ville.« 

En tout cas, voici un beau talent à aller applaudir lors de ses concerts en Floride et ailleurs !

* Oreille absolue : possibilité de reconnaître une note de musique à travers n’importe quel son émis.

Musimelange : les belles soirées musicales de Miami

 

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