La médecine américaine sous le feu des critiques
Les observateurs se demandent depuis longtemps comment les Américains n’arrivent pas à se doter d’un système médical digne, et c’est plus particulièrement le cas des expatriés venant de pays comme la France ou le Québec. Mais, quand ce sont les Américains eux-mêmes qui commencent à se poser des questions… c’est une nouvelle qui a son importance ! En l’occurence, Time Magazine a consacré un long article titré « Le docteur ne vous verra pas maintenant » et sous-titré « Longues attentes, rendez-vous courts, factures énormes : les soins de santé aux États-Unis provoquent le burn-out des patients ».
Mettons tout de suite des chiffres sur le malaise : en moyenne il faut 21 jours pour obtenir un rendez-vous médical où vous ne resterez que 18 minutes, dont généralement quelques secondes seulement avec le médecin. Résultat : 43% des Américains se déclarent (en 2019) mécontents de leur système de santé (contre 22 % des personnes des Britanniques et 26 % des Canadiens qui n’apprécient pas le leur). Rappelons que les Américains payent plus cher la médecine que dans les autres pays du monde civilisé. La bonne nouvelle c’est que les Américains commencent à savoir à quel point leur système est bancal. 12% seulement des adultes américains ont déclaré que les soins de santé étaient « extrêmement » ou « très » bien gérés aux États-Unis, selon un sondage de l’Associated Press-NORC Center for Public Affairs Research. Et, s’ils savaient ! S’ils savaient qu’il n’est pas normal de réveiller des patients malades toutes les deux heures dans un hôpital pour leur vendre des sandwichs ou leur effectuer le plus grand nombre de prises de sang possibles : autant d’actes bien évidemment facturés !
Entre autres problèmes plus généraux soulignés par Time, il y a la montagne de documents à remplir, et les différentes factures à régler, dont celles que vous avez DEJA réglées six mois auparavant !
Pour revenir sur l’aspect strictement médical, il est assez incroyable de constater à quel point le pays est avancé en matière scientifique, mais oh combien son système médical est mal organisé, avec des conséquences administratives mais aussi sanitaires. Quand les Américains ont accès à la médecine… parfois elle n’est pas toujours à la hauteur, c’est le moins que l’on puisse dire. Bien sûr, c’est la faute d’un système à réformer et pas celle du corps médical : la plupart des praticiens et des infirmiers ont un comportement irréprochable. Mais le problème est si grand aux Etats-Unis que l’espérance de vie moyenne est plus faible que chez le pauvre voisin cubain, et bien entendu également très faible en comparaison avec les autres pays développés. Malgré l’instauration de “l’Affordable Care” par Obama, il y an encore 10% de la population qui n’a pas d’assurance maladie. D’ailleurs, les mauvais soins encouragent plutôt les Américains à sortir du système. Beaucoup vont faire soigner tout ce qui n’est pas urgent dans d’autres pays : Mexique, Costa Rica, Colombie…
«Environ un quart des adultes américains n’ont pas de fournisseur de soins primaires et, en 2021, près de 20% n’avaient vu aucun médecin au cours de l’année écoulée. Les obstacles sont nombreux : l’obtention d’un rendez-vous peut prendre des semaines, en particulier dans les zones plus rurales où moins de médecins pratiquent, et les visites peuvent être coûteuses même pour les assurés. La recherche montre qu’au cours de l’année écoulée, la pression financière a poussé environ 40% des adultes américains à retarder ou à se passer de soins médicaux. (…) Ils en ont assez des prix élevés et des factures surprises. Ils en ont assez des prestataires qui les traitent comme des entrées de dossiers de santé électroniques, plutôt que comme des personnes.
Cela pourrait les dissuader d’obtenir des soins médicaux – et si cela se produit, l’Amérique pourrait devenir beaucoup plus malade qu’elle ne l’est déjà. Les patients sont, en un mot, épuisés. »
Quand on sait aussi qu’il y a beaucoup d’Américains très âgés, et que beaucoup sont dépendants aux médicaments, dont certains pourraient très bien être appelés « drogues » en français (le Fentanyl par exemple)… ça montre l’urgence de la situation.
Il n’y a pas que les patients qui sont fatigués : une enquête a établi à la fin de l’année 2022 que « 30% des médecins américains ont déclaré qu’ils se sentaient épuisés. » Néanmoins, c’est l’une des parties du problème : ils sortent de leurs études de médecine avec de lourdes dettes à rembourser. Or les généralistes sont vraiment moins bien rémunérés que les spécialistes, ce qui entraîne la diminution de leur nombre. De nombreux systèmes de santé paient les médecins généralistes en fonction du nombre de rendez-vous et de procédures qu’ils effectuent, ce qui favorise et récompense les visites ultra-rapides.
Le problème est sérieux, et Time Magazine propose quelques pistes de réforme, afin de mieux prendre en charge les patients, mais aussi simplifier et clarifier les parties administratives, dont la facturation… qui est bien souvent très opaque. Espérons que ça change : on parle tout le temps de ce qui va bien aux USA, mais sur ce point… il y a des progrès à faire !
PUBLICITE :