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Les leçons à tirer de l’ouragan Irma à Miami et en Floride

Après le passage destructeur de l’ouragan Irma sur Miami, l’heure du bilan a sonné, mais aussi celui des leçons à tirer en matière de sécurité.

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Des ordres d’évacuation pas (toujours) respectés

Un grand nombre de personnes a décidé de rester à son domicile durant l’ouragan Irma, y compris dans les endroits de la côte où l’évacuation était obligatoire. Cela permet certes de réparer son domicile en temps réel, d’étancher les fuites, de sauver ce qui peut l’être, et d’éviter d’éventuels vols… mais c’est tout de même assez risqué, il faut le rappeler, par exemple au niveau des accidents : la venue des secours et les soins médicaux ne sont pas remboursés (et ils coûtent chers aux Etats-Unis), et les secours ne sont pas sensés intervenir dans les zones à évacuation obligatoire : si vous les appelez, alors vous risquez soit de ne pas avoir de réponse… soit de mettre la vie des sauveteurs en danger.

Le problème des Fake News

Si Facebook a joué pour la première fois – en cas d’ouragan en Floride – un rôle positif dans la mise en place de solidarités et de communication directe entre les sinistrés et les personnes mobilisées pour aider, le plus fréquenté des réseaux sociaux a néanmoins comme d’habitude été le principal vecteur de fake news. Entre les cartes météo complètement folkloriques et les interprétations erronées des informations… il y en a eu pour tous les goûts.

LES FAUSSES ALERTES

Tout a commencé avant l’ouragan. Pour le cas de la communauté francophone, de pseudo « médias » (ils se reconnaîtront) ont cherché à faire du buzz. Ils n’ont généralement pas de lecteurs, mais poster ainsi des alarmes sur Facebook peut leur en apporter, et ils le savent. Dix jours avant l’arrivée de l’ouragan, ils publient ainsi des posts comprenant les mots « danger » et « Floride » ; soit trois jours avant l’alerte officielle annonçant le danger. Comme Irma a effectivement frappé la Floride, ils assurent ensuite à tous : « on vous l’avait bien dit ». Mais il n’y avait au départ qu’une chance sur vingt (ou quelque chose comme ça) pour qu’Irma frappe une zone urbanisée de Floride. La gestion de l’ouragan par les médias doit se faire de manière sérieuse : il n’y a aucune alerte avant l’alerte officielle donnée par le gouverneur de l’état. Publier des alertes à tout bout de champ, pour « faire du buzz », a deux conséquences : créer des mouvements de paniques pour rien, et d’autre part lasser les lecteurs qui, le jour où il y a une alerte sérieuse, n’y croient alors plus du tout.

LES RUMEURS

Avant le passage d’un ouragan, les questions les plus importantes restent malheureusement toujours sans réponse, et créent une angoisse importante chez ceux qui n’ont pas l’habitude : quand va-t-il passer ? Où va-t-il passer ? Vais-je avoir de l’essence si je pars maintenant ? Là aussi, les réseaux sociaux n’ont pas joué qu’un rôle positif, et en conséquence, les pénuries d’essence ont par exemple été très mal interprétées. Il y a en fait eu de l’essence à disposition partout en Floride, avec juste des ruptures d’alimentation temporaires, et des files d’attente importantes dans l’agglomération de Miami. Mais de nombreuses personnes ont tout de même eu peur de quitter le sud de la Floride parce qu’il n’y avait « plus d’essence ». Les conditions de trafic en direction du nord ont également été assez diversement appréciées. Elles ont changé d’heure en heure et, s’il était possible d’avoir une estimation actuelle du trafic, il n’était en revanche pas possible de faire des pronostics sur ce qu’il serait la nuit ou le jour d’après.

Le problème des touristes français

La plupart des commentaires émis par les canadiens francophones sur Facebook ressemblait à ça : « Merci Air Canada d’avoir rajouté des avions ». Leur connaissance de la Floride va apparemment jusqu’à une bonne maitrise de la gestion de crise en cas d’ouragan. Mais, pour les touristes Français, ça n’a pas été la même chanson. « Effectivement, la majorité des problèmes et des appels que nous avons reçus provenaient des touristes, car ils sont moins au fait que les résidents des comportements à adopter dans ce genre de situations« , commente Clément Leclerc, consul général de France à Miami. Pour un autre agent du service public, « Le principal problème, ce sont les frustrations« . Effectivement, les centaines de messages et coups de téléphones parvenus au Courrier de Floride vont dans ce sens : de nombreux touristes ont eu du mal à faire une croix sur leur vacances au soleil, d’autant que personne ne répondait à leurs questions sur l’heure et l’endroit du passage de l’ouragan. Beaucoup ont attendu. « On ne sait jamais, peut-être que l’aéroport ne va pas fermer, personne ne nous dit rien. » Difficile d’envisager de partir vers Atlanta alors qu’on ne parle pas bien anglais, qu’on n’avait pas prévu de sortir de Miami Beach, ni de louer une voiture, et que tout le monde dit sur Facebook que les routes sont bloquées par les bouchons et qu’il n’y a plus une goute d’essence. En conséquence, en plus des services publics français, de nombreux bénévoles se sont mobilisés sur Facebook afin de répondre aux angoisses et trouver des logements, tant en Floride qu’en Géorgie, souvent pour loger des touristes initialement en goguette à South Beach, et certains cas qui auraient pu être évités. Mais, bien entendu, s’il est possible de limiter la casse – peut-être en informant plus dans les avions durant la saison des ouragans – néanmoins cette entraide s’avérera toujours nécessaire (y compris pour les fêtards de South Beach).

La frustration ayant engendré de l’attente, elle aura aussi délayé les possibilités de monter dans des avions à tarif « normal » au départ de Miami, puisque dans les derniers jours avant le passage de l’ouragan les compagnies américaines ont largement forcé sur les prix. Prendre à temps un Air Canada à 250$ en direction de Montréal aurait pu permettre à beaucoup de regagner facilement et rapidement Paris.

Autres bons et mauvais points

Les autorités se préparent aux situations de crises, mais par définition, une crise vient chambouler l’ordre habituel des choses, et chacun a beau être préparé, rien ne se passe totalement comme prévu. Les premiers responsables de la sécurité aux Etats-Unis, c’est bien évidemment l’administration américaine, et il est assez flagrant que le gouvernement de Floride a mis en place un dispositif de secours d’une taille encore jamais vue auparavant dans l’histoire des Etats-Unis. Tout le monde a eu la possibilité d’évacuer à l’avance. « Un tiers des habitants de la Floride, soit 6,5 millions de personnes – c’est-à-dire l’équivalent de l’Autriche – ont reçu l’ordre de quitter leur domicile« , rappelle Clément Leclerc, « et le moins qu’on puisse dire après cette évacuation, c’est que ça c’est plutôt bien passé, avec des moyens considérables mis en place par l’Etat de Floride pour la sécurité et les secours. » Le consulat de France a dû lui même être évacué, tout comme la résidence consulaire, et l’équipe a dû prendre ses quartiers dans un hôtel français près de l’aéroport de Miami, qui fut à son tour frappé par une coupure d’électricité durant l’ouragan. « Nous avons toute de même réussi à assurer les permanences téléphoniques, et de son côté l’ambassade à Washington a mis en place une cellule de crise et un numéro d’urgence sur lequel les gens pouvaient appeler jour et nuit. Notre rôle au consulat, en cas de crise, n’est pas de nous substituer aux autorités américaines, mais de travailler en complémentarité, de manière institutionnelle, en expliquant aux gens qui ne sont pas familiers avec les dispositifs ce qu’ils pouvaient faire. Nous avons par exemple eu des appels de touristes qui étaient paniqués car les « shelters » étaient complets. Il fallait alors leur expliquer que les autorités les ouvraient dans un certain ordre, les uns après les autres, et leur dire comment savoir où il y avait de la place.« 

La solidarité a bien joué à Atlanta pour les Français de Floride
La solidarité a bien joué à Atlanta pour les Français de Floride

 

Le consulat s’appuie sur un réseau de « chefs d’îlots » dans chaque région de Floride, qui peuvent servir de lien avec les ressortissants nécessitant de l’aide. « J’ai eu trois appels téléphoniques de familles de touristes avant l’ouragan« , explique Valérie Bauwens, qui est le chef d’îlot de Coral Gables. « J’avais prévu de loger tout le monde chez moi, mais nous sommes aussi passés en ordre d’évacuation, et le réseau téléphonique a été coupé. Ils ont dû monter vers le nord de la Floride, mais ça s’est bien passé pour eux.« 

Les enfants français de Weston se mobilisant pour les victimes de l'ouragan Irma.
Bravo aux petits français de Weston pour leur mobilisation !

« Je suis soulagé, nous avons eu beaucoup de chance que le centre de l’ouragan ne passe pas directement sur Miami, mais il faudra être beaucoup plus organisé à l’avenir« , souligne Benoît Duverneuil qui s’est mobilisé avec d’autres pour gérer sur Facebook les situations de détresse et prépare justement avec des amis une association d’entraide. Certaines personnes mandatées pour être joignables ne l’ont guère été, mais pas la majorité. « Nous avons toujours été en contact avec les chefs d’îlots et le consulat à Miami« , confirme Emmanuelle Lachaussée, la conseillère de presse de l’ambassade à Washington, « et nos lignes de téléphone d’urgence n’ont jamais été saturées« . Quelques personnes ont toutefois affirmé avoir eu un peu de mal à joindre les services publics français aux Etats-Unis, mais selon nos informations il ne s’agirait que de quelques cas isolés.

Comme déjà dit, la mobilisation des bénévoles via Facebook a été importante, et il se pourrait bien que ce moyen de communication ait été le plus efficace durant l’ouragan. Reste que ces groupes Facebook sont absolument non-officiels, et il serait certainement important de les rendre au minimum « semi-officiels » de façon à ce que les services publics puissent s’appuyer sur des bénévoles formés afin d’apporter des réponses précises et concrètes aux personnes en détresse via ces groupes Facebook. Ca permettrait aussi d’éviter une dispersion des initiatives avec le risque de création de groupes parallèles ne répondant pas correctement aux questions liées à la sécurité. A noter qu’il y a évidemment une question de responsabilité pénale dans les conseils distribués en ces difficiles occasions. Si un fonctionnaire ou un particulier conseille par exemple à quelqu’un de se réfugier en voiture à Atlanta, et que ces personnes ont un accident sur la route… elles pourraient se retourner contre ceux qui les ont conseillé. En tout cas pour le consul de France, « ces groupes Facebook ont été d’excellentes initiatives« .

Différents témoins ont aussi souligné la mobilisation des consuls honoraires français dans le centre et le nord de la Floride et leur « good job » durant l’ouragan, alors que cela soit dit et répété !

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2 commentaires

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