La révolution trumpiste va être tentée (éditorial du Courrier des Amériques).
Les présidents américains se font toujours élire au terme de campagnes baignées par des musiques rock ’n’ roll assez viriles. Et puis, quand ils arrivent au pouvoir, certes ils sont craints sur la scène internationale, mais pour ce qui retourne de la politique intérieure ils se retrouvent somme toute avec un petit pouvoir managerial et, finalement, des marges de manœuvre très limitées.
– Voir nos autres articles sur la prise de pouvoir de Donald Trump
Donald Trump l’a finalement admis lors de sa dernière interview avec Tucker Carlson : quand il est arrivé à la Maison Blanche en 2017 avec un nombre de proches qui s’arrêtait à peu près à Mike Pence, Jared Kushner et Steve Bannon, il s’est progressivement rendu compte que tout le monde lui était hostile. Trop tard. C’est ce qu’on a appelé « l’Etat profond ». Et, à l’époque, Trump avait aussi la quasi-totalité des membres de son propre parti qui ne l’aimaient pas. Sa prise de pouvoir était donc isolée et assez verrouillée : fragilisée dès le départ.
Mais cette fois, les choses sont différentes. Dans les premiers jours ayant suivi sa nouvelle élection de novembre 2024, chacun a pu se rendre compte que Trump, cette fois, préparait rapidement son arrivée au pouvoir, avec un objectif de résultats. L’entourage de Trump (entre autres les ministres) joue sa crédibilité. Mais, cette fois, ont connaît aussi les héritiers. James David Vance semble déjà désigné comme le candidat républicain pour la prochaine présidentielle. Donald Trump Jr est très apprécié par le mouvement MAGA que, de facto, il a contribué à construire avec son père. Ces deux-là n’auront de futur qu’en cas de bons résultats de ce nouveau mandat Trump. Des résultats, des changements : c’est ce qu’ils préparent à très grande échelle.
Voici la situation de Trump : il a gagné la Présidence et le Capitole. Des tentatives d’entrave (comme les Impeachments) auraient encore moins de poids cette fois que lors du précédent mandat. Le nouveau président a donc deux ans devant lui pour faire à peu près ce qu’il veut.
La situation des USA est celle-ci : la macro-économie n’a jamais été aussi bonne, dans le pays le plus performant du monde. Mais un nombre de citoyens de plus en plus limité y profite des joies du capitalisme. En conséquence, ça craque dans beaucoup d’endroits. Ce n’est pas nouveau, ça fait des décennies que ça craque, mais c’est de plus en plus critique. Si le gouvernement Trump arrive à rétablir un peu la situation, des statues seront construites à son effigie !
Ainsi, Trump a donné des premiers signes on ne peut plus radicaux pour pouvoir faire bouger des lignes qui, d’ordinaire, n’aiment pas trop être secouées. Kennedy à la santé, Gaetz à la Justice, Musk à la réforme des agences d’Etat etc… Ce sont des combats de titans qui sont annoncés, comme on l’a rarement vu dans l’histoire des Etats-Unis. Le gouvernement fédéral arrivera-t-il à ses fins ? Ou bien se contentera-t-il seulement de construire 10km de mur en plus à la frontière avec le Mexique afin de contenter quelques électeurs ?
En tout cas il semblerait que Trump se donne les moyens d’arriver à des changements, avec un agenda conservateur (par exemple la « culture war » contre le wokisme). Il y a aussi un agenda qui devrait être un peu libéral (dans le désossement des agences fédérales), mais aussi, à l’opposé, avec des doses de nationalisme (protectionnisme économique, non-interventionnisme militaire…). Donc pas vraiment d’idéologie, mais surtout ce qu’on peut appeler (de manière positive) du pragmatisme, ou (de manière moins positive), ce que les Québécois nomment du « GBS » (Gros Bon Sens) (ce qui n’est pas souvent pour eux une flatterie).
Trump aurait pu, comme d’autre avant lui, réaliser un second mandat en forme de pré-retraite. Mais, non, comme on peut le voir, le trumpisme gronde.
AUTRES CONSIDERATIONS POLITIQUES :
– Le Parti Démocrate ne va pas seulement devoir changer de visages, mais aussi et surtout se doter d’un nouveau logiciel pour faire rêver, et convaincre, une majorité des Américains.
– Dans notre éditorial de novembre, nous avons expliqué comment connaître le nom du gagnant de la Présidentielle. Nous n’avons pas voulu choquer les lecteurs en donnant directement ce nom dans le journal, mais nous avons mis cet exercice en pratique dans une vidéo sur Youtube où, effectivement, nous donnions le nom du vainqueur 8 jours avant l’élection :
Certains ont toute de même reproché : « beaucoup de journalistes ont dit que ce serait serré alors qu’au final il y avait 6 millions de voix d’écart ». C’est notre cas, on a dit que ce serait « serré », et si on l’a fait c’est parce qu’on savait que ce serait « serré ». Six millions de voix d’écart c’était le résultat le 5 novembre avant que toutes les voix de (entre autres) la Californie soient comptées. Au final il y aura moins de 2% d’écart entre Trump et Harris et moins de 3 millions de voix (c’était déjà le cas le 15 novembre alors que la Californie n’était comptée qu’à 89%). Donc… oui c’est assez serré dans l’opinion nationale, même si (on ne peut conclure que là-dessus) : la victoire de Trump aura été brillante là où elle devait se jouer : les Swing States où les deux candidats ont fait campagne.
Par ailleurs, en 2016, contre l’avis de tout le monde, nous donnions aussi Trump au coude à coude avec Clinton.
Gwendal GAUTHIER
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